lundi 28 février 2011

Canisse - Olivier Bleys

La première impression que j'ai eue en lisant ce livre, impression qui a duré jusqu'à la fin, c'était de lire un nouvel épisode de la saga des Princes-Démons de Jack Vance. Dans la forme s'entend, pas dans le fond. L'histoire que nous raconte ici Olivier Bleys n'a rien à voir avec les aventures de Kirth Gersen (Voir les chroniques 1, 2, 3, 4 et 5). En revanche, les ambiances y sont les mêmes. Cette façon par exemple qu'ont les personnages de prendre leur vaisseau spatial pour se rendre sur telle ou telle planète, comme nous, nous prenons notre voiture pour aller dans telle ou telle ville, nous rappelle immanquablement les récits de Vance. Et Outre-Monde, cette partie de l'univers colonisé mais vivant en dehors des lois rappelle, nécessairement, l'Au-Delà de Vance. D'une façon plus générale, les récits de l'un comme de l'autre suggère un space-opera intimiste. Bel oxymore (1). Dans un cas comme dans l'autre, ce qui intéresse l'auteur, c'est bien plus l'individu que la multitude.
Sauf que, et c'est là que le bât blesse, l'auteur français n'a pas l'humour de l'auteur américain (du moins dans ce livre) et n'a surtout pas son sens, il est vrai inégalable, du récit. Il n'a pas sa folie.
Je n'ai pas trouvé non plus les personnages très attachants. Ils ne sont pas assez développés à mon goût et perdent par conséquent beaucoup de consistance. L'histoire aurait pu être très originale mais manque, elle aussi, de développement. Et si, tout simplement, ce roman était trop peu épais (205 pages) ? un comble de dire ça pour moi qui proclame ma lassitude des pavés. Même l'étude des Canissiens, qui n'est pourtant pas sommaire manque tout de même, là encore en comparaison avec ce que nous fait l'ami Jack, de profondeur.
Quant à la fin, j'avoue n'y avoir pas tout compris. Comme si, par hâte d'en finir, l'auteur nous balançait une conclusion vite fait, sans souci de vraisemblance ou de crédibilité.
Il n'en est pas moins vrai que le livre se lit facilement et non sans plaisir. Il ne figurera juste pas dans mon Panthéon personnel. Mais ça n'est pas bien grave.

Autres avis :

(1) Rappel : Un oxymore est une figure de style qui consiste à réunir deux termes que leur sens devrait opposer. Comme : Cette obscure clarté qui tombe des étoiles (Corneille)

dimanche 27 février 2011

La Brèche - Christophe Lambert

Je ne suis pas, a priori, très amateur des récits de voyage dans le temps. L'effort qui m'est demandé à ma suspension d'incrédulité (ah oui, désolé, je m'exprime en français. Une sale habitude. Je voulais dire : suspension of disbelief), cet effort, donc, est souvent très (trop ?) important. Parce que, autant vous le dire tout de suite, je ne crois absolument pas à la possibilité de voyager dans le temps. Et que dire des fameux paradoxes temporels qui titillent ma raison et sont souvent plus agaçants qu'un essaim de mouches tourbillonnant ? Mais bon, je dois aussi reconnaitre que ce thème peut être également l'occasion de nous raconter des histoires pas banales et très enthousiasmantes et que les paradoxes pré-cités sont susceptibles de donner naissance à des exercices intellectuels du plus grand intérêt. Dans le genre, j'ai littéralement adoré, récemment, Sans parler du chien de Connie Willis. Autrement dit, le talent de l'auteur doit être important pour me faire oublier, le temps de la lecture, que ce qu'il essaie de me vendre est proprement invraisemblable.
C'est dire si je l'attendais au tournant, Christophe Lambert.
Et bon, que dire, si ce n'est que le piège a parfaitement fonctionné et que je m'y suis engouffré la tête la première ? Et que j'y ai même pris du plaisir. L'histoire est plaisante, les personnages attachants, le style agréable. L'auteur s'est visiblement particulièrement bien documenté sur le débarquement dont il nous parle ici.
Reste que l'ensemble ne m'a pas semblé d'une originalité folle. Il y a bien quelques bonnes idées mais malheureusement trop rares. C'est l'un des autres inconvénients des histoires de voyages dans le temps : quand on en a lu un, on les a tous lus. Il faut faire preuve de beaucoup, beaucoup d'imagination pour faire du neuf avec ce vieux concept. Sans parler de ce happy end dans le happy end qui m'a singulièrement agacé. Cela m'a fait penser à un peintre qui aurait réalisé un tableau figuratif plutôt réussi mais qui aurait gribouillé dans un coin un personnage digne d'un enfant de six ans, avec une tête ronde et des membres en fil de fer. On finit par ne plus voir que ça et ça gâche tout. Dommage !
En conclusion, un roman sympathique et vraiment très agréable à lire mais, comme on dit pudiquement, pas le roman du siècle.

Les avis de la blogoshère :
Si je vous ai oublié, n'hésitez pas à gueuler un bon coup et surtout, surtout, à déposer en commentaire un lien vers votre chronique.

jeudi 24 février 2011

World War Z - Max Brooks

Ce livre n'est pas un roman. Pas même, à proprement parlé, un recueil de nouvelles. Il s'agit d'une compilation de récits, de témoignages portant tous sur une supposée guerre mondiale ayant opposé l'humanité aux ... zombies.
On pouvait donc craindre un caractère répétitif et à la longue assez ennuyeux. Il n'en est rien. Loin de là. D'abord parce que le livre est divisé en plusieurs sections qui traite d'un des aspects, d'une des périodes de cette guerre. On passe donc par l'origine de la contamination, l'épidémie, les premières solutions « locales », la guerre proprement dite, etc. De plus, chacun des récits est particulièrement bien fichu. Aucun d'eux n'est médiocre et il en est plusieurs tout simplement exceptionnels. Certains dégagent même une émotion assez forte.
Mais la qualité première du livre, outre un style très agréable, c'est son intelligence. On sent que l'auteur a parfaitement préparé le terrain avant de se lancer dans l'écriture. Si les zombies existaient et si cette guerre avait eue lieu, on dirait de l'auteur qu'il est bien documenté. mais les zombies n'existent pas (si,si, je vous jure) et cette guerre non plus a fortiori.
Max Brooks ne s'est donc pas documenté, forcément, mais il semble avoir réfléchi à tous les aspects, les conséquences, qu'une telle guerre pourrait avoir sur la planète. Il ne néglige aucun domaine. Il traite de conséquences aussi diverses que l'impact militaire, économique, politique, bien sûr, mais aussi écologique, démographique, moral, philosophique et même psychiatrique. Et j'en oublie tout un tas.
Je ne suis pas un spécialiste des zombies ni même un très grand fan. Ceci expliquant cela. Mais je souhaite dire à tous ceux qui seraient aussi tièdes que moi que ce livre est tout ce qu'il y a de plus lisible pour quelqu'un qui n'a pas d'appétence particulière pour le sujet voire pour quelqu'un que le sujet ferait fuir.
Il est à noter que ces zombies, dont on parle tout du long, bien entendu, sont au final, paradoxalement, assez absents. Au travers de tous les témoignages que nous sommes amenés à lire, ce sont, encore une fois, les conséquences sur la vie des gens qui s'expriment que nous découvrons. À peine si nous sont narrées quelques batailles opposant vivants et zombies. Mais si elles sont rares, elles sont mémorables.
Un excellent livre, donc, que j'ai littéralement dévoré (sans jeu de mots). Il paraitrai même que l'ouvrage ferait plus de 500 pages. Ah oui ? Je gage que vous aurez plaisir à le lire, que vous soyez amateurs ou non des morts-vivants.

Il(s) ou elle(s) en parle(nt) :
BiblioMan(u)
Gromovar
Efelle

dimanche 6 février 2011

Nephilim - Asa Schwarz

Il y a quelques temps, je recevais un mail de France Loisirs m'indiquant que la date limite pour satisfaire à mon obligation d'acheter un livre par trimestre, approchait. Je me rend donc dans la boutique la plus proche pour remplir mon devoir. Après avoir passé un bon bout de temps dans les rayons, prenant et déposant nombre d'ouvrages, je devais me rendre à l'évidence : les livres du catalogue de F.L. ne sont pas tout à fait ma tasse de thé. Je le savais déjà, notez bien. Mais jusqu'ici, j'étais parvenu à faire les quelques achats qui m'étaient réclamés sans trop de difficulté. On trouve (parfois) de très bonnes choses (de mon point de vue s'entend). Après tout, ils avaient bien édité Terreur de Dan Simmons ou L'Étrange vie de Nobody Owens de Neil Gaiman. Bon, sans doute l'erreur d'un stagiaire d'été qui avait cru bon d'inscrire ces excellents ouvrages dans le catalogue. Bref, après moult hésitations, je jetais finalement mon dévolu sur ce Nephilim. Guère plus convaincu que ça.
Il faut savoir que Nephilim est un condensé de tout ce qui est peu ou prou à la mode ces temps-ci.  C'est un livre très tendance. D'abord il s'agit de Fantasy/Fantastique. Enfin vaguement. Une petite teinte, juste pour dire. Ça donne surtout dans le mystique. Genre Dan Brown. Ça fait vendre, coco, ça fait vendre. Ça parle aussi d'écologie. Ça c'est porteur. Dans l'air du temps. Et puis enfin (mais là, l'auteure n'y est pour rien) ça nous vient tout droit de Scandinavie. Et ça aussi, mine de rien, c'est à la mode en ce moment.

 Mais voilà. Être tendance, c'est aussi prendre le risque de nous servir du déjà-vu. Paradoxalement. Pas de l'ancien, bien entendu. Par définition. Mais du connu. On sature. C'est l'overdose. Le ras le bol.
J'ai donc entamé la lecture avec pas mal d'a priori négatifs. Mais qu'est-ce qui m'avait donc pris d'acquérir ce bouquin ? Ah oui ! J'ai déjà expliqué pourquoi. Bon, bah, puisqu'on y est, allons jusqu'au bout. Justifions la dépense.
Nous voilà donc plongés dans une histoire qui va, essentiellement, tourner autour de deux personnages. Féminins. Logique. L'auteure est une femme après tout. Et puis moi, ça ne me dérange pas, mais alors pas du tout de côtoyer des figures de femmes dans les romans. J'aime bien, au contraire.
Nous avons donc, à ma gauche Nova, jeune activiste de Greenpeace prête à (presque) tout pour faire triompher sa cause. À ma droite, Amanda, inspecteur de police. La première va se trouver impliquée dans une série de meurtres assez horribles. La seconde est chargée de l'enquête. Rien que de très classique.
Mais les personnages sont assez bien campés. En particulier Amanda, qui n'a rien du policier infaillible qui découvre la vérité en moins de temps qu'il n'en faut pour le dire. Sans être tout à fait fragile ou vulnérable elle est humaine, simplement. Et de plus, son organisme se rappelle à son bon souvenir de façon assez violente. Elle n'est pas à la fête pour son enquête.
Le style est fluide et très efficace. Rien de très démonstratif. Il est tout entier dédié à l'action. N'espérez donc pas mieux connaitre Stockholm à l'issue de votre lecture. Mais le rythme est là.
Et au bout du compte, contre toute attente, on arrive au bout du roman sans avoir eu l'impression de s'ennuyer une seconde. Rien de bien extraordinaire, donc, mais un livre qui se laisse lire. Gentiment. C'est déjà pas si mal.


samedi 5 février 2011

Terre sans mal - Martin Lessard

Quatrième de couverture
Au XIVe siècle, sur les rives d'un continent alors inconnu des Européens, U'tal, un jeune Guarani de quatorze ans, remet en cause une tradition qu'il juge trop violente. A ses yeux, le supplice de l'initiation n'a pas lieu de se dresser sur le chemin qui mène à l'Abaagui, la Terre sans mal. Dominant la terreur que lui inspirent les étrangers, il prend la route des hautes montagnes de l'Ouest et rencontre un homme reclus qui devient son ami. Ensemble, ils créent un lieu où la violence n'a pas sa place. Une terre de paix où le liage des races permettra aux mortels de convaincre Namandu d'accorder à leurs âmes le repos éternel. Mais le sang souille bientôt cette utopie et le destin d'Ut'al se jouera ailleurs... 750 ans plus tard, une immense nef extraterrestre apparaît dans le ciel. U'tal est de retour et, au nom des Guides, il a un marché à proposer à l'humanité. Pour son premier roman, Martin Lessard décrit de façon réaliste, avec une ambition peu commune, l'impact d'un premier contact extraterrestre sur les plus hautes sphères du pouvoir mondial. Roman lumineux, optimiste mais sans angélisme aucun, Terre sans mai navigue à contre-courant de la science-fiction actuelle. 

Impossible pour moi, du moins dès que j'ai attaqué la seconde partie, de ne pas penser à Robert Charles Wilson. Et en particulier à son roman Le vaisseau des voyageurs. Là comme ici, les terriens, pardon, l'humanité, reçoit une visite, a priori amicale, de voyageurs extra-terrestres. Et à chaque fois, les visiteurs ont une proposition à faire aux humains. Mais là s'arrête la comparaison. Alors que le roman de Wilson vire assez vite au récit post-apocalyptique (même s'il n'y a pas d'apocalypse au sens ordinaire) et nous décrit une terre d'où l'humain a presque entièrement disparu, Martin Lessard préfère nous parler d'une humanité face à l'un de ses choix les plus important. Peut-être même le premier et seul choix qu'elle ait eu à faire en tant qu'espèce face à une espèce étrangère.
À partir de là, nous allons suivre l'existence d'une poignée d'individus tant sur Mars ou sur la Lune que sur Terre et qui vont devoir choisir (la plupart d'entre eux vont faire un choix rapide) entre cynisme, pragmatisme, voire appétit de pouvoir et simplement humanisme. Comme chez Wilson, là encore, Martin Lessard profite de son récit pour dresser la peinture d'une galerie de personnages dignes d'intérêt. Mais je dois avouer que les personnages de Terre sans mal ont tout de même moins de profondeur que ceux du Vaisseau des voyageurs. Mais quand l'un des deux auteurs a déjà signé une dizaine de romans, l'autre n'en est qu'à son tout premier.
Et ma foi, comme coup d'essai, on est en droit de parler de coup de maître. Le style est fluide et parfaitement efficace. Le tout se laisse lire sans aucun moment d'ennui mais au contraire avec beaucoup de plaisir. Le propos est intelligent et nous laisse son lot de réflexions comme une écume sur les rivages de notre esprit. Car il en traite des sujets l'auteur. Tant politiques que philosophiques ou moraux. Je déplorerai juste que par moment le discours m'a paru un peu difficile à suivre. Je n'ai pas toujours compris ni les prises de position des uns et des autres ni pourquoi parfois les évènements prenaient telle ou telle tournure. Mais la faute m'en incombe sans doute davantage qu'à l'auteur dans la mesure où je suis un lecteur assez dissipé. La fluidité du style que j'ai déjà évoquée participe sans doute à endormir la vigilance du lecteur. Un conseil donc, accrochez-vous un tant doit peu si vous êtes, comme moi, du genre à divaguer.
Mais qu'importent ces petits défauts que nous mettrons sur le compte d'un premier roman. Martin Lessard m'apparait déjà, sans aucun doute, comme un futur grand nom de la SF. Et pas que francophone.

Ce qu'en pense BiblioMan(u).

Hunger Games, 2 - Suzanne Collins

L'embrasement
Résumé
Après le succès des derniers Hunger Games, le peuple de Panem est impatient de retrouver Katniss et Peeta pour la Tournée de la victoire. Mais pour Katniss, il s’agit surtout d’une tournée de la dernière chance. Celle qui a osé défier le Capitole est devenue le symbole d’une rébellion qui pourrait bien embraser Panem. Si elle échoue à ramener le calme dans les districts, le président Snow n’hésitera pas à noyer dans le sang le feu de la révolte. À l’aube des Jeux de l’Expiation, le piège du Capitole se referme sur Katniss…


J'avais, à l'époque, dit tout le bien que je pensais du premier volet. Ce second opus ne démérite pas, bien au contraire. Il est, d'une certaine façon, encore meilleur que le précédent. Sans doute parce qu'il reprend (nécessairement) quelques éléments déjà développés dans le premier mais en s'y attardant beaucoup moins longtemps (inévitablement), de sorte que  le rythme s'en trouve encore accentué. Et on ne peut pas dire que le premier tome était particulièrement lent. Certes pas. 
Du rythme donc, beaucoup de rythme. Des personnages (en partie les mêmes) encore un peu plus creusés et par conséquent, un peu plus attachants. De nouveaux venus et pas des moindres dont certains nous font frissonner. Enfin, un surtout. Un style fluide, efficace. Une histoire solide, très bien construite. Et même si nous retournons au sein des Hunger Games (après tout, c'est le nom de la trilogie) et qu'on pourrait craindre des redites et partant, un sentiment d'ennui, il n'en est rien.
Suzanne Collins a su admirablement renouveler le suspense de ces jeux barbares et nous en offre une seconde vision absolument différente de la première. J'ignore jusqu'à quel point on peut dire que cette trilogie est réellement destinée à la jeunesse. Même si l'héroïne est une adolescente, le fait que le récit soit à la première personne (c'est donc elle qui parle), nous fait nous rapprocher d'elle, quel que soit notre âge. Sur le site de France Loisirs, il est stipulé que ce roman est destiné aux 9 ans et plus. Ma fille va très bientôt atteindre cet âge et j'avoue ne pas l'imaginer lire des choses aussi violentes (violentes pour son âge, j'entends. Il n'y a aucun passage vraiment gore. Mais on est loin, loin, des bisounours).
Je dirais que ce livre est destiné aux adolescents et aux adultes. Ces derniers trouveront matière à s'enthousiasmer sauf s'ils ne condescendent à lire que les auteurs qui pratiquent la masturbation intellectuelle. Ici, il est surtout question d'aventure et d'action et plutôt bien fichues, même si sentiments et réflexions ne sont pas laissés pour compte. Loin de là.
Une réussite majeure !
Un tout petit, minuscule, insignifiant bémol. La fin de ce deuxième tome est bien moins fermée que pour le précédent. Pour ne pas dire qu'elle est diablement ouverte. Beaucoup, beaucoup de choses restent à régler. Vivement le troisième opus. Moi je vous le dis !