mercredi 7 avril 2010

DM08 - Au guet ! - Terry pratchett


Quatrième de couverture
Une société secrète d'encagoulés complote pour renverser le seigneur Vétérini, Patricien d'Ankh-Morpok, et lui substituer un roi. C'est sans compter avec le guet municipal et son équipe de fins limiers. Enfin une affaire à la mesure du capitaine Vimaire, alcoolique frénétique, et de ses non moins brillants adjoints. Et lorsque l'on retrouve au petit jour dans les rues les corps de citoyens transformés en biscuits calcinés, l'enquête s'oriente résolument vers un dragon de vingt-cinq mètres qui crache le feu ; on aurait quelques questions à lui poser. Peut-être la collaboration du bibliothécaire de l'Université ne serait-elle pas inutile. Certes, à force de manipuler les grimoires de la plus vaste collection de livres magiques du Disque-monde, il a depuis quelque temps été métamorphosé en singe, mais qui a vraiment remarqué la différence ?

 (Lecture commune du Cercle d'Atuan du mois de mars 2010)

Je ne le dirai sans doute jamais assez, mais derrière l'humour ravageur et omniprésent de Pratchett, il y a une peinture féroce de notre société moderne. Mais il y a aussi une galerie de portraits de personnages tous plus attachants les uns que les autres. Une galerie hors du commun. Du moins selon les codes convenus de la fantasy. Parce que communs, les personnages de Pratchett ne le sont que trop. Banals, ordinaires. C'est sans doute ce qui nous les rend plus proche. Le héros Pratchettien n'est pas grand et beau et fort et invulnérable. Il est lâche, faible, égoïste et j'en passe. C'est du moins comme ça que sont la plupart des personnages masculins. Les femmes quant à elles, jeunes ou moins jeunes, sont rarement les beautés irrésistibles des romans du genre. Mais leurs qualités sont ailleurs. Ou plutôt, c'est parce qu'ils transcendent tous ces défauts-là qu'ils deviennent aussi attachants.
Pour ne pas échapper à la règle, Au guet ! se pare d'un échantillon de cette humanité ordinaire plutôt réussi. Il y a d'abord Vimaire, le capitaine du guet, personnage plébiscité par la plupart de mes camarades du Cercle d'Atuan. Non seulement il y a longtemps qu'il n'a pas assumé son véritable rôle de patron de la police municipale, mais il a fini par sombrer dans l'alcoolisme. Seulement, que l'on tente d'occire quelques uns de SES concitoyens, même si certains ne sont pas très recommandables et que l'on mette SA ville à feu et à sang, c'est le cas de le dire, et notre capitaine va vite retrouver l'amour propre qu'il avait mis de côté. Ensuite il y a Dame Rankin. Une aristocrate spécialiste des dragons. Son physique n'est certes pas sa première qualité. Ce qui lui vaut, à son âge, même si celui-ci n'est pas précisé, d'être encore vierge. Ce qui ne sera pas d'ailleurs sans avoir quelque conséquences fâcheuses. Elle montrera cependant d'énormes qualités de générosité et de courage. Il y a aussi les deux sous-officiers du guet. Deux anciens que leur expérience à rendu extrêmement prudents et philosophes. Leur crédo : pas de vague. Leur méthode : n'arrêter jamais personne et n'être jamais en danger de le faire. Pour compléter l'équipe nous avons Carotte. C'est une toute nouvelle recrue. Un idéaliste. Il connait par coeur le code des lois de la cité et n'hésite jamais, lui, à arrêter tout contrevenant. S'agirait-il d'un dragon de 25 mètres.
Puis il y a le Patricien Vétérini le cynique dirigeant d'Ank-Morpock qu'on se surprend à trouver presque sympathique. Et le bibliothécaire anthropoïde, oook ! Et quelques autres encore.
Ensuite ou en même temps ou en plus, c'est comme vous voulez, il y a l'histoire. Et elle n'a rien de bâclée. Loin de là. Elle est solide et le récit autour d'elle est particulièrement bien construit. C'est le genre d'histoire qu'enviraient beaucoup de romanciers dits sérieux et qui met particulièrement bien en situation les personnages dont j'ai déjà eu l'occasion de parler. Les évènements qui se déroulent dans le roman placent souvent les différents protagonistes devant des choix qu'ils auraient préféré ne pas avoir à faire.
Le tout est saupoudré d'une ironie mordante et salutaire vis à vis des quelques petits travers de la société, d'un part, et de la fantasy, d'autre part.
Sont tour à tour épinglés : la monarchie (si, si, par un britannique), les élevages de petits toutous à leur mémère, la versatilité de la foule, les clichés sur les guildes de voleurs, les dragons, les nains et j'en passe.

On peut difficilement écrire une chronique sur un livre de Pratchett sans citer au moins une ou deux phrases. En voici quelques unes sélectionnées pour leur humour et/ou leur qualités littéraires.
... un petit groupe insistant de cellules grises du mauvais côté de ses synapses gribouillaient sournoisement leurs graffitis sur la façade de son émerveillement.
Faut pas courir vite dans l'Guet, mon gars... Tu peux faire un garde rapide, ou tu peux faire un vieux garde, mais tu peux pas être un vieux garde rapide
Et quand le praticien était mécontent il se révélait très démocratique. Il trouvait des moyens raffinés et douloureux de faire partager son mécontentement au plus grand nombre.
C'était un de ces points où le pantalon du Temps bifurque, et si on ne faisait pas gaffe on risquait d'enfiler la mauvaise jambe ...
Et je pourrais en citer des centaines d'autres. Mais souvent, l'humour d'une phrase dépend du contexte. Pour restituer la drôlerie de la plupart d'entre elles, il faudrait citer des paragraphes entiers voire davantage. Du coup, pour en profiter pleinement, un seul conseil : lisez le livre.


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2 commentaires:

  1. Moi qui adore le guet, je ne l'ai même pas encore lu !

    Je crois que ça me donnerais vraiment une vue d'ampleur sur tout ce que j'ai aimé dans les autres livres

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  2. La ligne du Guet est un bon cru, tu peux continuer sur la lancée, Vimaire et Carotte devenant de plus en plus attachant.

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