dimanche 30 octobre 2011

Fortitude - Larry Collins

1944. Les Alliés préparent le débarquement en Normandie. Mais face aux services de renseignement particulièrement efficaces d'Hitler, ils imaginent une vaste et délicate opération d'intoxication ayant pour but de faire croire à l'État Major allemand que le débarquement aura lieu dans le Pas de Calais. Il s'agit de l'opération Fortitude. C'est l'histoire de ces femmes et de ces hommes courageux mais pour certains aussi sacrifiés que Collins a choisi de nous narrer.

J'ai lu fort peu d'ouvrages traitant de la Seconde Guerre Mondiale ou de la Résistance. En principe, le sujet me tente assez peu. Sans doute parce qu'il est trop proche et trop chargé émotionnellement. Trop proche parce que mes parents étaient de jeunes adultes pendant l'occupation. J'ai donc très bien connu des personnes ayant très (trop) bien connu cette époque. Trop chargé émotionnellement parce que la barbarie qui régnait alors sur l'Allemagne a laissé des traces profondes dans nos esprits, en tout cas dans le mien.
Pourtant j'ai tenu à lire ce best-seller (une fois n'est pas coutume) et bien m'en a pris. Certes, ce n'est pas le style de l'écriture qui rendra ce roman inoubliable. Il a un petit côté « exposé » ou « reportage » écrit qui nous empêchera de lui tresser des lauriers littéraires. Cependant, il faut bien reconnaitre qu'il se lit très bien et même avec plaisir. Et même ce côté journalistique renforce l'impression de réalisme d'une histoire qui, ne l'oublions pas, s'inspire, au plus près, de faits réels.
Quoi qu'il en soit, il faut admettre que la peinture des différents protagonistes du récit est particulièrement réussie. Même si l'auteur n'évite pas toujours la caricature. Mais notons tout de même que tous les allemands ne sont pas des monstres ni tous les officiers alliés des saints. Il n'y a guère que les membres de la Gestapo qui sont exactement ce que l'on attend qu'ils soient, mais il serait peu envisageable de ne pas voir chez eux certains penchants au sadisme, ou, à tout le moins, un manque total de scrupules.
Impossible dès lors de ne pas trembler pour tous ces résistants ou agents alliés, contraints, par la force des choses, d'œuvrer au sein de l'ennemi. D'autant que le roman est riche en agents doubles, voire triples. On ne sait plus qui est avec qui. Les patrons des services secrets étant parfois aussi perdus que les autres. Mais ce qui menace le plus ces combattants de l'ombre ce sont ceux qui les emploient, les utilisent, les manipulent pour mieux dire. Les enjeux sont en effet d'une telle importance que certains grands chefs n'hésitent pas à sacrifier certains de leurs agents. Il était tellement vital qu'Hitler cesse de penser que le débarquement aurait lieu en Normandie, que les hommes et les femmes envoyés sur le terrain devaient être eux-mêmes persuadés que ce dernier devait avoir lieu dans le Pas de Calais. Quoi de mieux que d'être convaincu d'une fausse information lorsqu'on est susceptible d'être soumis à la torture ?
On verra comment, par souci d'intoxiquer les allemands, les chefs des services secrets alliés ne reculent devant aucune horreur. Cela fait froid dans le dos. Mais peut-on lutter contre des barbares avec des armes de gentlemen ? That's the question.
Un excellent roman qui nous plonge dans cette période d'horreur avec efficacité. À lire, ne serait-ce que pour ne pas oublier. Une petite piqure de rappel.

vendredi 28 octobre 2011

Solaris - Stanislas Lem

Le docteur Kris Kelvin est envoyé en mission sur la planète Solaris. Cette dernière est constituée en quasi totalité d'un unique océan qui semble vivant mais avec lequel personne n'a encore réussi à communiquer jusqu'ici. Ce qui explique qu'après des dizaines années d'expériences et de recherches infructueuses, les scientifiques ont pour la plupart renoncé à établir un contact et ont quittés la planète. Kelvin découvre donc une station pour ainsi dire déserte. Même les robots d'entretien sont rangés, inactifs, dans leur hangar. Le nouvel arrivant ne rencontre qu'un seul de ses collègues, le docteur Snaut. Mais ce dernier a un comportement pour le moins curieux. Pourtant, au milieu de cet endroit vide d'êtres humains, Kelvin va croiser des créatures sorties d'on ne sait où. Il va découvrir très vite que chacune de ces créatures est liée, il ne sait comment, à chacun des occupants de la station. Bientôt, il va recevoir à son tour une visite totalement inattendue dans sa propre chambre. Il s'agit de Harey, la petite amie qu'il avait lorsqu'il était jeune adulte. Problème : elle s'est suicidée il y a de cela fort longtemps. D'où vient cette copie parfaite ? Comment est-elle arrivée là ? Pourquoi ? Kelvin va vite découvrir que l'océan n'est pas étranger à ces phénomènes. Il semble qu'il soit capable de matérialiser avec une précision diabolique, les souvenirs qu'on croyait les plus enfouis. En tout cas, les plus pénibles. Ceux qu'on ne voudrait pas voir resurgir.
Voilà, je crois que je vous ai tout dit. Pourtant je n'ai certainement pas pu gâcher votre plaisir de lecture tant ce livre est avant tout affaire d'ambiance. Les plus perspicaces d'entre vous l'auront compris, nous sommes face dans ce, magnifique, roman à un huis-clos étouffant. À côté des passages purement « techniques » mais, rassurez-vous, parfaitement lisibles tels que les recherches que Kelvin entreprend sur l'océan, lisant quantité de documents qu'il a trouvé dans la bibliothèque et qui nous permettent d'en apprendre un peu plus sur la planète; nous trouvons des passages entiers pleins de questionnements, plus axés sur l'humain, j'ose dire plus philosophiques.
J'ai littéralement adoré cette conversation dans le chapitre éponyme entre Snaut et Kelvin. Le premier reprochant au second sa légèreté, son égoïsme, sa cruauté. Lorsque Kelvin prétend qu'il veut à tout prix sauver sa fiancée, ou du moins sa copie, Snaut lui rétorque qu'il ne pense qu'à son bonheur à lui et pas aux conséquences que cela pourraient avoir sur la « créature ». On ne peut pas ne pas penser, dans ce passage et dans d'autres, à Blade Runner et aux « répliquants ». Robots avec des sentiments ou bien humains dans un corps synthétique ?
Si vous cherchez de l'action, passez votre chemin. Si vous pensez que la Science-Fiction doit procurer au lecteur des matériaux pour sa réflexion, précipitez-vous.

La guerre éternelle - Joe Haldeman

La Terre est en guerre contre une race extra-terrestre : les Taurans. Le soldat William Mandella fait partie d'une troupe d'élite chargée d'aller combattre l'ennemi. L'entrainement commence sur Terre puis se poursuit sur une planète particulièrement inhospitalière, censée reproduire les conditions épouvantables de la planète où sont basés les Taurans. Puis la troupe est enfin envoyée au combat ...
Le titre comporte deux mots clés : guerre et éternelle. C'est moins le substantif que le qualificatif qui lui est adjoint qui intéresse Haldeman. Cela se sent. Même si il est beaucoup question de la guerre dans les pages du roman et même presque exclusivement de cela, c'est sa durée exceptionnelle qui fascine l'auteur. 
Du fait des théories de la relativité, les soldats participants à la guerre contre les Taurans, voyageant à des vitesses proches de celle de la lumière, vieillissent moins vite que les personnes restées sur Terre. Ne me demandez pas plus d'explications, je serais bien en peine de vous en fournir. Toujours est-il qu'entre deux batailles, des décennies, voire des siècles s'écoulent. Et notre vaillant Mandella ne prend guère que quelques mois, tout au plus quelques années.
Et c'est finalement les inconvénients liés au passage du temps différent suivant les individus qui fascine l'auteur puis le lecteur. Mandella est victime de la double peine. Il voit disparaitre les uns après les autres ses frères d'armes mais le temps lui vole aussi les membres de sa famille. Pire que tout peut-être, les « bleus » qui viennent renforcer les rangs plutôt clairsemés de ses compagnons de combat ont des mentalités totalement différente de la sienne. Au niveau de ses mœurs, en particulier, il devient un objet de curiosité, voire de dégoût.
Alternant des scènes de combat, rares et plutôt bien foutues avec des passages plus propices à la réflexion mais jamais ennuyeux, cette Guerre Éternelle renouvèle plutôt pas mal le genre de la guerre spatiale.

La musique du sang - Greg Bear

Vergil Ulam est chercheur chez Genetron. Sa spécialité : les bio-chips. À mi-chemin de l'ordinateur et de la cellule, avec la puissante de calcul de l'un et la taille de l'autre, le bio-chip est censé amélioré les capacités de l'organisme.Lorsque Genetron décide de mettre fin à ses travaux et de détruire ses échantillons, Ulam, désespéré, s'injecte les micro-organismes. Il ignore alors qu'il vient de déclencher la fin de l'humanité.
Ce roman ne manque certainement pas de qualités et il se lit jusqu'au bout sans déplaisir. Malheureusement, il suit et abandonne trop de pistes pour demeurer du début à la fin totalement passionnant.
Après avoir suivi un temps les aventures de Vergil Ulam, nous sommes amenés à suivre l'un de ses amis pour finalement s'intéresser à un troisième larron. Sans compter les aventures de personnages secondaires qui, si elles ne sont pas dénuées d'intérêt, semblent, au bout du compte, faire plus office de remplissage qu'autre chose.
La troisième partie est de loin la plus longue et nous entraine dans un récit apocalyptique au cours duquel nous assistons, non pas à la disparition pure et simple de l'humanité mais au moins à sa transformation radicale. Hélas, l'angle choisi par l'auteur, s'il est assez original, m'a laissé de marbre. La focalisation sur cet individu qui perd petit à petit son humanité m'a peu intéressé dans la mesure où je ne l'ai pas trouvé sympathique.
Un roman pas mauvais donc mais très fouillis. À trop se disperser, l'auteur finit par nous perdre.