Le Mot de l'éditeur :
Une Guerre Sainte est en marche dans un monde divisé entre magie et religion. Trois hommes que tout sépare devront inverser le cours des choses pour éviter une nouvelle Apocalypse : Achamian, un sorcier-espion, enquête sur le chef suprême des Mil Temples, une caste religieuse puissante, opposée depuis des siècles aux castes des sorciers ; Cnaiür, chef des barbares Scylvendi, d'une violence et d'une brutalité hors du commun, voit son passé sinistre resurgir ; et enfin Anasûrimbor Kellhus, un moine mystérieux, descendant des anciens rois est la recherche de son père.
Face à eux : la Consulte, une étrange créature légendaire qui œuvre avec les sorciers au cœur même de la Guerre qui s'annonce.
Face à eux : la Consulte, une étrange créature légendaire qui œuvre avec les sorciers au cœur même de la Guerre qui s'annonce.
Je confesse avoir été très inquiet lorsque j'ai entamé la lecture de ce livre. Le prologue est en effet rédigé dans un style particulier qui rend parfois la compréhension du texte malaisée. Il est à la fois poétique, philosophique, lyrique, en un mot très littéraire et certes magnifique mais malheureusement un peu confus. Mais plus que le style, c'est le ton qui rend le texte difficile d'accès. On a souvent davantage le sentiment de lire les impressions, les réflexions parfois complexes des personnages qu'un récit traditionnel d'évènements. Ajoutons à cela une entrée de plain-pied dans un univers qu'on soupçonne riche mais qui nous est totalement inconnu et nous aurons une idée de la difficulté de cette entame.
Fort heureusement, l'impression ne dure pas et dès le premier chapitre, nous assistons à une rupture sensible du ton qui, même s'il demeure littéraire, est beaucoup plus accessible. Et nous avons enfin le sentiment que l'histoire commence.
Elle s'articule essentiellement autour de quatre personnages principaux d'une importance telle qu'ils sont à l'origine (au moins pour trois d'entre eux) de l'intitulé de trois des cinq parties de ce premier tome. Le sorcier, la catin et le guerrier (les deux autres parties étant : l'empereur et la guerre sainte).
Le sorcier c'est Drusas Achamian. Les sorciers sont regroupés en ordres, en communautés appelés scolasticats. Achamian est un scolastique du Mandat. Cette académie de sorciers est la seule à croire à l'existence et à vouloir combattre la Consulte, une menace qui pèse sur l'humanité toute entière et qui n'est pour tous les autres qu'une légende. On ne saura pas grand chose sur cette Consulte, le mystère qui l'entoure étant complet ce qui la rend plus terrifiante encore.
Esmenet est une prostituée (la catin) amie d'Achamian dont elle est secrètement amoureuse. Le guerrier c'est Cnaiür, un barbare scylvendi, un peuple semi-nomade de cavaliers qui n'est pas sans rappeler les mongols. Il est courageux, impitoyable, intelligent. Redoutable.
Et puis il y a Anasûrimbor Kellhus, sans doute mon préféré même si tous les personnages principaux ont quelque chose d'attachant, chacun à leur manière. C'est une sorte d'érudit. Un homme de grand savoir et de grand pouvoir. Ses connaissances inclues l'art du combat ce qui en fait un guerrier exceptionnel. C'est une sorte de moine-combattant errant, un prêtre shaolin voyageur. Un autre Kwai Chang Caine (1).
À ces quatre premiers personnages on pourra ajouter un empereur stupide, un général émérite, un prince ambitieux, un pontife illuminé ... Tous vont se retrouver liés par un évènement majeur d'une portée quasi mondiale : la Guerre Sainte. Une sorte de Croisade revue et corrigée par l'auteur. Tout y est jusque dans certains détails troublants. Le chef religieux, instigateur de cette Guerre Sainte est Maithanet, l'équivalent d'un pape. Sa religion est d'ailleurs fortement inspirée du christianisme, à n'en point douter. Son prophète est Inri Séjénus. Inri, comme l'inscription qu'aurait fait apposer par raillerie Ponce Pilate sur la croix du Christ. Inri comme Iesus Nazarenus Rex Iudaeorum (Jésus de Nazareth, Roi des Juifs (Judéens)). Quant à Séjénus c'est un quasi anagramme de Jésus. La Guerre Sainte, elle, consiste en la conquête de territoires et en particulier d'une ville sainte, Shimeh, dont le nom peut évoquer, avec de l'imagination, Jérusalem ou Salem, Yerushalayim en hébreu. Son déroulement même la rapproche de son modèle réel. La Guerre Sainte Vulgaire narrée dans le livre est calquée sur la Croisade des Gueux. L'épisode des futurs territoires conquis revendiqués à l'avance par l'empereur du roman rappelle l'exigence similaire qu'avait eu, à l'époque, l'empereur de Byzance. Jusqu'au nom de Golgotterath qui fait bien sûr penser à Golgotha. D'autres, plus érudits que moi, trouveront encore d'autres parallèles, à n'en point douter.
Les circonstances particulières vont amener tout ce beau monde à s'aimer ou à se haïr, à s'allier ou à s'affronter, à se faire confiance ou à se trahir. Parfois alternativement, parfois en même temps. Dans ce maelström qu'est la guerre, chacun agit selon ses propres convictions, ses propres intérêts, qui peuvent un temps coïncider avec ceux des autres mais pas indéfiniment.
Seul petit point noir du roman, c'est l'accumulation de noms forcément nouveaux pour nous de personnages, peuples, pays, religions, langues. À ce sujet, je ne saurais trop vous conseiller de vous reporter aux appendices à la fin du volume. L'essentiel y est expliqué.
C'est donc, vous l'aurez compris, à une formidable épopée que nous invite Bakker, pleine de bruit et de fureur comme l'écrivait le grand William. Un cocktail réussi de batailles, de combats, de mystères, d'alliances contre nature, de manigances, de séductions, la liste est longue. Le tout servi par une belle langue. J'aurais du mal à comparer cette œuvre à une autre, aucun nom ne me venant spontanément à l'esprit, mais s'il le fallait absolument alors ce serait probablement au Seigneur des Anneaux, sans les elfes, hobbits et autres orques, mais avec la même force épique.
Ils en parlent :
J'en profite pour vous inviter, si vous ne connaissez pas déjà, à découvrir le site d'Estellou et ses chroniques intelligentes et bien foutues.
On ne présente plus Cédric de Hugin & Munin ou Martlet.
(1) Héros de la série télévisée Kung Fu diffusée dans les années 1970.
Pas convaincu, j'ai l'impression de devenir très difficile en matière de fantasy. :(
RépondreSupprimerJe suis *heureux* que tu ais aimé ce premier volume, Arutha. Le meilleur - de loin - est à venir :)
RépondreSupprimerA mon sens, Le Prince du Néant est la deuxième meilleure série de fantasy épique que j'ai pu lire, et je la conseille à tous les lecteurs de Fantasy exigeants.
@ Efelle : désolé de ne pas t'avoir convaincu. J'ai presque l'impression d'avoir raté ma chronique, du coup.
RépondreSupprimer@ Martlet : je pense également qu'il s'agit d'une toute bonne série de fantasy.
Après El Jc, passer chez Arutha n'était peut-être pas la chose à faire quant à la bonne santé de ma LaL. En attendant, découvrir des bouquins inconnus et aussi bien desservi par la chro que tu en fais donne singulièrement envie. Mon âme d'historienne ne pouvait que répondre à l'appel, l'ensemble fait singulièrement envie ^-^
RépondreSupprimer@ Ryuuchan : oui mais El Jc je suis sûr qu'il le fait exprès. Moi je lis plein de daubes à côté de ça ;o)
RépondreSupprimerJe te confirme que ce doit être un régal pour quelqu'un féru d'histoire. Je ne suis qu'un amateur mal éclairé.
Coucou Arutha ! C'est très gentil de faire référence à mon blog ! J'étais très occupée en ce début d'année avec l'arrivée de mon fils Alix et j'ai donc complètement négligé mon blog mais j'espère pouvoir m'y remettre cet été.
RépondreSupprimerEn tout cas, je suis ravie que tu aies apprécié cette lecture ! Tu imagines combien c'était difficile aussi pour moi de suivre l'intrigue en anglais mais l'écriture est si brillante et envoûtante que finalement, j'avais dévoré ce premier tome !