La jeune Ki voit rouge le jour où sa famille se fait massacrer par les harpies, ces créatures ailées sacrées aux yeux de tous. Bravant l'interdit, elle détruit le nid de l'une d'elles et la tue. Désormais poursuivie sans relâche, tant par les harpies que par leurs nombreux serviteurs humains, et prête à tout pour leur échapper, Ki accepte de convoyer un chargement vers la lointaine Diblun, quitte à devoir emprunter le redoutable " Col des Soeurs ". Un seul homme, Vandien, voleur de profession, ose la suivre et se dresser à ses côtés contre la toute puissance des harpies. Leur périple s'annonce long et périlleux ...
On a beaucoup dit, ici ou là, que ce premier roman de Megan Lindholm n'était, malgré ses qualités, pas tout à fait à la hauteur des oeuvres que l'auteure, sous le nom de Robin Hobb, allait publier. On a parlé de prémices, de promesses, de voix naissante. Bref, ce n'était pas encore du Robin Hobb. Je ne suis pas loin de partager ces avis. Mais j'apporterai tout de même deux précisions. La première c'est que ce premier roman, EST, malgré tout, du Robin Hobb. J'entend par là que tous ceux qui n'apprécient pas cette auteure peuvent passer leur chemin. Aucune bonne surprise ne les attend. La seconde est qu'il s'agit indubitablement d'un très bon roman, si ce n'est pas, à l'évidence, un chef-d'oeuvre.
Le roman peut être divisé en deux parties, emmêlées, imbriquées l'une dans l'autre. La première partie concerne les aventures proprement dites de Ki et Vandien. Elles se déroulent dans le présent des personnages. Ki est une jeune femme à l'origine mal définie mais qui a été élevée parmi les romnis, dont le modèle est à chercher auprès des gens du voyage, devenus très à la mode dans la fantasy moderne. Elle a pour mission de transporter, dans sa roulotte, des pierres précieuses pour le compte d'un marchand. Elle rencontre Vandien lorsque celui-ci tente de lui voler l'un de ses chevaux. Elle le surprend, le maîtrise puis décide finalement de le laisser l'accompagner. Le reste est assez classique, les deux personnages étant amenés à franchir un col réputé infranchissable à cette époque de l'année. Déjà ici, ce qui compte chez Lindholm-Hobb, c'est davantage la psychologie des personnages et comment ils vont s'apprivoiser l'un l'autre, que l'action proprement dite.
La seconde partie est toute entière faite des flashbacks de Ki qui la ramènent à une période plus douloureuse de sa vie, au moins du point de vue psychologique. Elle se rappelle les moments où elle a perdu son mari Sven et ses deux enfants, tués par une harpie. Elle se rappelle son désir de vengeance et le besoin qu'elle a ressenti de décimer, à son tour, la famille de la harpie. Elle se rappelle enfin sa vie au sein de la famille de Sven. C'est probablement la partie la plus intéressante du roman. Il s'agit, à mon sens, d'une charge fine et intelligente, contre l'intolérance. La famille (la tribu) de Sven nous est d'abord présentée comme des gens, certes un peu obtus, mais néanmoins assez sympathiques et accueillant. Mais au fur et à mesure que Ki, et nous à ses côtés, apprend à les connaître, elle découvre à quel point ils peuvent, pour certains d'entre eux, se révéler campés sur leurs certitudes, aveuglés par leurs croyance, englués dans leurs traditions. Ils la traitent, elle, l'étrangère, celle qui ne partage pas leur foi, avec mépris, condescendance, voire haine. Tout ceci est amené lentement, inexorablement, comme si le voile qui recouvre la noirceur de leur âme s'effilochait petit à petit. Je ne me rappelle pas avoir lu si souvent des portraits aussi réussis de salauds bien-pensant.
Une autre des qualités de ce roman, et pas la moindre, est sa taille. Il "pèse" 285 pages et se suffit à lui-même. Chaque tome de la saga étant indépendant. Et en ces temps de surenchère du nombre de pages qu'est supposé avoir un roman de fantasy, c'est un vrai bonheur.
Au final, un excellent roman qu'il n'est certes pas indispensable d'avoir lu mais qui vaut largement quelques pavés indigestes dont nous sommes quotidiennement abreuvés.
Je n'ai rien contre les pavés, mais j'ai mis l'Assassin Royal de côté pour des jours sereins. Les sagas colossales de SF que je suis déjà me forçant a me limiter dans mes incartades en Fantasy. Euh enfin excepté le Trône de Fer, bien entendu ! ;o))
RépondreSupprimerJe met ce titre de côté, car l'occasion de lire un roman de Fantasy à la taille décente, n'est pas si fréquente. Merci Artutha.
Content de te revoir par ici. Tu sors de ta torpeur ou bien tu n'ouvres qu'un oeil pour le moment ? J'ai cru comprendre que tu était overbooké.
RépondreSupprimerJe suis comme toi vis à vis des énormes saga. Y'en a marre (sauf le TdF ;o) ).
Tu remarqueras que je fais de plus en plus de one-shot.
Quant à l'assassin royal, ce n'est que 6 volumes en poche en vf.
Bien vu ! Je n'ouvre encore qu'un oeil en ce moment. Pris par mes obligations professionnelles et le suivi que j'opère des opérations des principales agences spatiales, l'une de mes autres occupations dévoreuses de temps... ;o))
RépondreSupprimerIl y a quelques temps, il avait attiré mon attention. Sans doute détournée par d'autres livres...
RépondreSupprimerLe peu que je connaisse de Lindholm/Hobb j'ai bien accroché, il y a donc des chances qu'il me plaise également :)
"Chaque tome de la saga étant indépendant. Et en ces temps de surenchère du nombre de pages qu'est supposé avoir un roman de fantasy, c'est un vrai bonheur."
A qui le dis-tu, tu as très bien fait de le préciser...