mercredi 1 juillet 2009

Chromozone - Stéphane Beauverger

Chromozone 1

J'inaugure avec ce billet une habitude qui, je l'espère, durera longtemps. J'ai en effet l'intention de me passer désormais de la quatrième de couverture et de faire un résumé personnel des livres. C'est plus dur mais c'est plus mieux.

Le lieu tout d'abord. Notre bonne vieille terre. Plus précisément l'Europe. Et plus précisément encore : Marseille, Berlin, Enez Eussa (Ouessant). L'époque ? Loin, ou pas si loin, dans le futur. Pour être exact, 15 ans après l'apparition d'un virus informatique qui a détruit, irrémédiablement, tous les systèmes d'information et de communication.
Plus d'internet : l'horreur.
Les gouvernements et les autorités traditionnelles ont disparus. Les gens se sont regroupés en communautés le plus souvent ethniques ou religieuses, enfermées dans des quartiers entiers placés sous haute sécurité : les conforteresses. Quant au pouvoir, qui ne reste jamais longtemps vacant, n'est-ce pas ? il est détenu, quelle surprise, par de grosses multi-nationales qui développent de nouveaux moyens de communication ce qui les placent, de facto, en position de dominer le monde.
C'est dans ce contexte que nous suivons l'itinéraire de trois personnages.
Teitomo à Marseille. C'est une espèce de policier géant qui semble davantage agir de sa propre initiative que sous les ordres de ses chefs.
Gemini à Ouessant. C'est un gamin qui tente de survivre sur une île abandonnée de tous. Ici, le pouvoir est assuré par une bande de pseudo-celtes, des nazillons prônant la suprématie de la race blanche et toutes ces conneries.
Justine à Berlin. Justine est la femme et la plus proche collaboratrice du patron de la plus grosse entreprise en charge de développer les nouveaux moyens de communication, moyens principalement basés sur les phéromones. C'est l'ère de l'homme-abeille en quelque sorte.
Bien entendu, l'histoire va réunir ces trois là. Ce qui m'amène, au passage, à dénoncer une pratique de plus en plus courante, je trouve, consistant à dénigreravec force cette façon de procéder. Ces critiques semblent préférer un scénario plus linéaire. Et si moi je disais que la linéarité je trouve ça chiant. On me dira que tous les goûts sont dans la nature. Je suis d'accord. Mais justement, pourquoi tomber à bras raccourcis sur l'auteur qui utilise cette façon de présenter son récit. Démarrer l'histoire au moment où tous les personnages sont déjà réunis c'est d'une raconter une autre histoire, de deux se priver des raisons qui les ont conduits à être réunis.
On peut critiquer le style de l'auteur, la pauvreté de son histoire, l'inconsistance de ses personnages. Mais sa construction ? J'en reste pantois. Cette technique est vieille comme mes robes et elle est le fondement même de l'un des meilleurs polars français que je connaisse : Le cercle rouge. Fin de la parenthèse énervée.
Ces trois histoires convergentes sont, en outre, l'occasion pour l'auteur de changer de ton, de rythme, d'univers. D'autant que, comme vous l'aurez compris, nos trois héros sont situés sur des barreaux bien différents de l'échelle sociale. De tout en bas avec Gemini, à tout en haut avec Justine en passant par un niveau intermédiaire avec Teitomo.
Tout cela est écrit dans un style simple et direct, très facile à lire et avec beaucoup de rythme. Les personnages sont particulièrement réussis et complexes. Ni blancs, ni noirs, ils sont capables du meilleur comme du pire. L'ensemble n'a pas été sans me faire songer à Philip K. Dick (j'ai pensé, forcément, à Docteur Bloodmoney) ou à John Brunner. Excusez du peu. L'auteur nous présente une vision très noire, mais malheureusement, très réaliste du futur.
Si j'avais un reproche à faire à ce premier tome, c'est le manque d'explications ou d'éclaircissements des évènements, des technologies, des situations. Nous savons très, très peu de chose de ce qui s'est passé, ni le comment, ni le pourquoi. Rien, si je ne m'abuse, sur ce que sont devenus les différents gouvernements. Rien sur la façon dont fonctionnent les nouvelles techniques de communication. Quid aussi de la police à laquelle appartient Teitomo ? Je n'ai pas le souvenir qu'on sache qui la finance par exemple.
Je pense qu'il s'agit avant tout d'une vieille tradition des écrivains d'anticipation français qui privilégient l'écriture (style et histoire), là où leurs homologues anglo-saxons privilégient les longues explications scientifiques. Parfois je me dis qu'un juste milieu serait juste parfait.

Voilà en tous cas un premier opus qui m'a donné très envie d'attaquer la suite. Disons-le tout net : j'aime bien ce que fait Stéphane Beauverger.

Critique chez Nebal

2 commentaires:

  1. Hi Man,

    Joli doublé que vous faites avec Nébal là. Pour ma part je suis assez partisan de ces introductions personnelles des personnages qui permettent de faire quelques focus intéressants sur leur situation ou leur environnement propre. Cela me fait penser à cette chronique des Tours de Samarante que je me suis promis d'écrire et qui n'attends que moi... Je vous mets ça en ligne ce week-end, et je te la recommande tout particulièrement.

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  2. D'accord avec toi. J'aime aussi les multiples fils narratifs.

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