lundi 25 avril 2011

Gagner la guerre - Jean-Philippe Jaworski

J'avoue avoir eu une petite appréhension avant d'entamer la lecture de ce roman. Pour des raisons assez inexplicables. Ce n'est rien de dire que j'avais adoré Janua Vera, du même auteur. De plus, ma nouvelle préférée était celle-là même qui mettait en scène le héros du roman. Peut-être ai-je été un peu intimidé par la taille de l'ouvrage (979 pages chez Folio). Je l'ignore. Ce que je sais, en revanche, c'est que dès que j'ai entamé la lecture, mes doutes se sont envolés.
D'abord j'ai retrouvé le style exceptionnel de Jaworski qui en fait un écrivain pour de vrai et pas seulement un fabricant de roman de fantasy au talent moyen voire douteux, comme on en connait tant. D'autant plus qu'il nous gratifie de la verve du personnage principal qu'est Benvenuto Gesufal et qui est, accessoirement, le narrateur de l'histoire. Il faut savoir que don Benvenuto, pour ceux qui n'auraient pas lu Janua Vera, est un tueur à gages entré au service de l'un des personnages les plus importants (le plus important ?) de la République de Ciudalia (sorte de Venise revisitée). Il possède donc à la fois la gouaille du milieu dont il est issu mais également le langage châtié de ces grands qu'il fréquente désormais. Le résultat est plutôt réussi et parfaitement crédible. Et moi qui voue depuis toujours un amour immodéré à cette langue qu'on dit verte, j'ai été particulièrement gâté par les quelques dialogues argotiques dont le roman est semé. Même si, il faut l'avouer, je fus quelque peu surpris dans un premier temps par les propos de certains personnages qui faisaient immanquablement penser à l'argot typiquement parisien des siècles passés, je me suis vite convaincu qu'il n'était pas plus surprenant d'entendre des personnages de fantasy s'exprimer dans la langue de Gavroche que d'entendre les habitants du Vieux Royaume converser en bon français.
Le spadassin nous entraine à sa suite dans des (més)aventures diverses et variées. D'aucuns diront peut-être trop diverses et trop variées. Qu'on en juge. On enchaine bataille navale, torture, séjour en prison, périple à travers le pays, exil ... je ne vais pas non plus tout vous dévoiler.
Alors c'est vrai, le tout ressemble à un assortiment de choses hétéroclites et tient plus, à première vue, du collier de perles disparates et qui n'auraient en commun que d'être enfilées sur le même fil, que du puzzle qui, bien que constitué de pièces différentes, forme un tout cohérent. Et pourtant, à mieux y regarder, chaque élément est à sa place et manquerait par son absence.
Petit bémol cependant. Ça n'engage que moi (même si d'autres partagent mon point de vue. Voir les chroniques), mais j'ai trouvé la présence de nains et d'elfes un poil de trop. Voire inutile. Voire gênante. Comme un cheveu sur la soupe. Pourquoi diable avoir agrémenté le récit de leur présence dont il aurait fort bien pu se passer ?
Mais en dehors de ça (qui n'est pas un défaut majeur), ce roman est une vraie réussite. Sans vouloir relancer le débat : fantasy, sous-littérature ? je dirais simplement que lire un bon roman de fantasy écrit par une excellente plume, c'est un plaisir que je n'ai pas boudé. Voilà.
Gagner la Guerre est juste, de mon point de vue, une œuvre majeure du genre. À lire, absolument.

Ils en parlent aussi :
Hugin et Munin
Gromovar
Efelle
Cédric Jeanneret
Guillaume
Sandrine
Salvek

12 commentaires:

  1. Pour les elfes il était un peu obligé après Janua Vera, les nains c'est quand même assez amusant de les entendre gueuler "gare aux couilles" en marchant dans la foule :D

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  2. @ Guillaume : ayant une mémoire de poisson rouge, j'ai oublié la présence d'elfes dans Janua Vera. Parce que c'est ça que tu sous-entends, n'est-ce pas ?

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  3. Voui voui, je comprends la petite gêne aux entournures que provoque l'apparition inopinée des elfes; mais, comme je le disais ailleurs à Guillaume44, moi, je les trouve rafraîchissants, ces elfes.
    Et je te rejoins absolument sur la saveur toute particulière des dialogues et de la langue dans laquelle l'œuvre est écrite.

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  4. Tout pareil. C'est un chef d'oeuvre.

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  5. Moi aussi je me demandais un peu ce que faisaient les les elfes et les nains dans cet univers (déjà dans Janua Vera ça fait un peu décalé), menfin c'est un bien maigre défaut pour un si bon roman :D

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  6. Me suis posée la même question pour les elfes et les nains, d'autant plus que je n'ai pas lu Janua Vera ! Mais c'est pas vraiment gênant vu la qualité du reste :p

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  7. Je viens de découvrir JPJ et c'est vrai que son écriture est très bien agencée. J'attaquerai bientot Janua vera

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  8. Faut que je lise ce bouquin, faut que je lise ce bouquin, faut ...

    Et un avis positif de plus :p

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  9. Tigger Lilly, faut que tu lises ce bouquin, faut que tu lises ce bouquin, faut ...
    ;o)

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  10. Je n'ai pas le temps pour ce pavé que je me promet de découvrir pourtant depuis pas mal de temps. Qu'importe ! Il est depuis ma lecture de Janua Vera, dans ma "bibliothèque de garde". Il y vieillira comme une bonne bouteille, en attendant une occasion spéciale.

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  11. Détrompe toi, c'est un pavé qui se dévore très rapidement. En une petite semaine c'est terminé !

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  12. Comme je suis un peu flemmard, je me contente de recopier le commentaire sur "Gagner la guerre" publié en son temps chez Efelle, je crois. Mais vu que j'ai trop envie de porter aux nues le bouquin de Jaworsky (comme beaucoup l'on fait), je disais donc :

    Sûr que par les temps qui courent, ce n'est pas évident de tomber sur un roman de ce niveau. En plus, je ne suis pas souvent un grand fan de la fantasy, mais de temps en temps, on tombe sur un joyau. Et ce "Gagner la guerre", il vaut son pesant de carats.
C'est surtout que le niveau d'écriture extraordinairement élevé induit une ambiance à couper le souffle. Jaworsky varie les styles : tantôt précieux, tantôt argotique. Fantastique précision des termes moyenâgeux ou maritimes. Tu es en plongé, comme si tu y étais, dans des intrigues de cour, des complots, des assassinats. Tu es dans la ville basse et ses tavernes borgnes, dans les maisons de débauche ou dans les palais des condottieres. Les fouets claquent sur le dos des galériens. Du pur cinoche grand écran. Sans oublier les duels ! Ah, ces duels : des scènes d'action pure parmi les plus belles du genre (surtout 15 pages de suite vers la fin. Et c'est écrit en petit.........). Bref, 28 euros pour 685 pages bien serrées, cela fait 4 centimes la page. T'en as pour ton fric et tu en redemandes. Vavavoum, ça fait du bien. (Le nombre de pages fait référence à l'édition de base, mais le raisonnement reste valable pour celle en poche).

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