Un mage sur le point de mourir effectue sa dernière quête, guidé par son bourdon (bâton magique). Sa mission : remettre le symbole de son pouvoir au huitième fils d'un huitième fils. C'est ainsi qu'il arrive chez le forgeron du village de Trou d'Ucques, huitième fils de ses parents et lui-même sur le point d'avoir un huitième fils. Le mage confie son bourdon au forgeron puis meurt, comme prévu. Ce qui n'était pas prévu c'est que le huitième fils est ... une fille. Et voilà comment Eskarina, Esk pour les intimes, hérite d'un objet magique que la tradition destine habituellement aux garçons. C'est ce que ne va cesser de répéter la sorcière du village, Mémé Ciredutemps, Esmeralda pour ... personne, à la gamine. On n'a jamais vu de femme mage. Mémé va donc initier Esk à l'art de la sorcellerie, réservé à la gent féminine. Mais après un exercice qui tourne mal, Mémé va devoir se rendre à l'évidence : Esk possède un don pour la magie. Elle décide donc, en dépit de ses convictions, de conduire l'enfant à l'Université Invisible, lieu de formation des mages du pays. Et le voyage, avec une gamine qui n'en fait qu'à sa tête, ne va pas être de tout repos.
Ce troisième volet constitue à l'évidence un tournant dans les annales du disque-monde. Ou, pour mieux dire, il isole les deux premiers, en faisant d'eux de simples esquisses qui précèdent le dessin définitif et qui, malgré leurs indéniables qualités propres, ne contenaient qu'en germe les qualités qui constituent ce troisième opus.
Ici, plus question d'aventures débridées qui n'ont qu'un seul but : faire rire. Nous avons droit à une vraie histoire avec un début, un milieu, une fin. Des personnages fouillés, attachants, surprenants. Au même titre que Rincevent dans les deux premiers épisodes, Mémé suscite chez le lecteur une vive sympathie. Malgré, à moins que ce ne soit à cause de ses défauts. Elle est plutôt grincheuse, râleuse, méfiante, peu avenante, campée dans ses certitudes, d'une ignorance crasse dans tout ce qui n'est pas la sorcellerie. Oui mais voilà, elle a un coeur gros comme ça. Et quand elle décide d'emmener Esk chez les mages, elle qui n'a jamais été plus loin que le village, rien ni personne ne peut l'arrêter. Ce qui nous donne droit à un voyage vers Ankh-Morpork assez cocasse et une rencontre avec les mages pas piquée des vers.
C'est indéniablement le séjour dans la désormais célèbre ville qui m'a le plus enthousiasmé, à savoir le dernier tiers du livre. Mais un bon tiers tout de même qui ressemble à s'y méprendre à une moitié. Le summum étant la confrontation de Mémé, la sorcière et Biseauté, l'Archichancelier.
Le ton reste drôle mais un rien moins déjanté. Mieux canalisé oserais-je dire. La méthode, la "patte" pourrait-on dire reste toujours la même et elle est portée au rang d'un art. C'est la façon de raconter l'histoire qui fait rire ou sourire. Ni les évènements ni les personnages ne sont drôles.
Un exemple parlant mieux qu'un long discours, je ne résiste pas au plaisir de signaler ce court passage où les objets de toilette de la chambre de Mémé, pris dans un tourbillon magique se brisent en morceaux. Raconté par un Stephen King, nul doute que la scène nous ferait dresser les cheveux sur la tête. Chez Pratchett cela donne :
... sur la table de toilette, le broc et la cuvette au si charmant motif au bouton de rose se brisèrent en morceaux. Sous le lit, le troisième membre du traditionnel trio de porcelaine se métamorphosa en une chose immonde qui se défila furtivement.
Voilà le genre de périphrase typique de l'humour Pratchettien. Nommer le pot de chambre, le troisième membre du trio de porcelaine, il fallait le trouver et l'oser. Bien sûr, ça rend la manifestation de magie beaucoup moins inquiétante mais personnellement, je ne m'en plains pas.
Et si en plus, mine de rien, Pratchett nous faisait une petite dénonciation du machisme et du sexisme ? Si ce n'en est pas une, ça y ressemble diablement.
Les annales du disque-monde c'est drôle, c'est agréable, c'est, n'hésitons pas à le dire, intelligent. Alors, qu'attendez-vous pour vous y mettre ?
J'aime beaucoup ce tome, car on commence à bien voir le caractère de Mémé Ciredutemps (qui demeure un de mes personnages préférés), et puis le traditionnel thème de la femme au sein de la société, blabla :D
RépondreSupprimerUn très bon souvenir.
RépondreSupprimerJ'ai adoré ce tome, encore plus que la huitième couleur ou le huitième sortilège !
RépondreSupprimerEt Mémé est tellement extraordinaire. C'est dans ce volume qu'elle décrit la têtologie ? Je ne me rappelle plus ...
Parfaitement Céline :
RépondreSupprimer- Alors les gens qui te voient arriver avec ton chapeau et ta cape, ils savent que t'es une sorcière; et c'est pour ça qu'elle marche, ta magie ? fit Esk.
- Parfaitement, répondit Mémé. On appelle ça de la têtologie."
Le passage du duel entre Mémé et Biseauté est aussi l'un de mes passages préférés.
RépondreSupprimerJ'ai adoré ça ! Un très bon tome, je suis pressée de continuer ma lancée pratchettienne.
Le duel entre mémé et Biseauté, il met fait penser à celui de Merlin et Madame Mim dans Merlin l'enchanteur :p
RépondreSupprimerComparaison bien trouvée Lilly. :o)
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