Cale Hanniford, la cinquantaine, vient de perdre sa fille, Wendy, tuée par Richard Vanderpoel, le jeune homme avec lequel elle vivait à New York. Couvert de sang et incohérent, celui-ci a été arrêté et jeté en prison, où il s'est pendu. Pour la police le dossier est clos, cependant Hanniford veut le rouvrir : il est sûr que Richard est coupable, mais, rongé par le remords de ne pas avoir fait assez pour sa fille, il aimerait savoir pourquoi elle a fini par se prostituer et mourir assassinée. Matt Scudder comprend, vite qu'Hanniford lui ment sur un point capital. Pressé de réponde, celui-ci finit par lâcher que Wendy n'était sa fille que par adoption. Flairant l'arnaque, Scudder décide d'enquêter : la police est-elle allée trop vite en accusant le fils d'un pasteur élevé dans le strict respect de la loi divine ?
Un sympathique corbeau de mythologie exilé outre-atlantique écrivait naguère :
J'attends d'un polars 3 ingrédients de base :
- un personnage central avec des pleins et des déliés, torturé entre son travail et sa vie amoureuse, un type avec des dilemnes moraux, des squelettes dans ses placards et un sens de la répartie plus mordant qu'un pit-bull affamé.
- un décor (souvent urbain) découpé au scalpel, peuplé de figurants qui sentent bon le réel. L'âme de la ville doit avoir son écho dans la psyché du personnage central.
- une intrigue qui me fait me poser des questions, une enquête qui progresse en montrant l'absurdité de la hiérarchie, les instincts du flic, les fausses pistes que l'on aime désamorcer. La procédure policière peut être plus ou moins mise en avant, mais ça doit me happer.
(vous trouverez l'intégralité ici)
Je ne sais pas si je partage cette opinion. Ou pas. En fait, je ne m'étais jamais vraiment posé la question. Quoi qu'il en soit, les oeuvres de Lawrence Block me semblent coller pile poil à ces exigences. En particulier la série des Matt Scudder qui est, à ce jour, la seule que j'ai abordée.
Le personnage d'abord. Dans le genre plein et déliés, il n'est pas mal du tout. C'est un ancien flic devenu alcoolique. Même si ce premier opus de ses aventures n'aborde pas le sujet de manière explicite (ça viendra), le bonhomme boit beaucoup. Et pas que du café. Il a quitté la police après la mort, accidentelle, d'une fillette dont il se sent responsable. Voilà pour le cadavre dans le placard. Ses dilemmes moraux sont semés tout le long du roman. Est-il préférable de faire le mal pour de bonnes raisons ou de faire le bien pour de mauvaises ? Un flic peut-il balancer un type dans l'Hudson quand il le sait coupable de meurtre mais sans avoir de preuves ? Et ainsi de suite.
Lorsqu'il était encore dans la police, il ne refusait jamais l'argent qu'on lui proposait. Même s'il n'en aurait jamais réclamé de lui-même. Voilà pour la morale.
Pourtant, au bout du compte, même s'il ne dédaigne pas de recourir à la violence quand on le cherche, Scudder est un type bien. Il fait preuve d'une rare indulgence (plus pour les autres que pour lui-même) et se garde de juger. Ce qui le rend d'autant plus attachant.
Le décor ensuite. Il s'agit ni plus ni moins de New-York. Peut-être pas tant New-York d'ailleurs, dont on visite surtout les bars, il faut bien le dire, que les New-Yorkais. Ce qui revient au même. L'âme d'une ville ne se trouve-t-elle pas précisément dans ses habitants ? Et des New-Yorkais, forcément, on en croise. Des barmen (tiens-donc), des concierges, des portiers, des putes, des ménagères, des flics, des chauffeurs de taxi, des prêtres ... Au fil des rencontres de Matt, c'est un portrait vivant de New-York qui se forme. Sans oublier les news qui jalonnent le récit et qui complètent l'image, pas très rose, de la grosse pomme.
L'intrigue enfin. Dans ces Péchés des pères, comme souvent chez Scudder, c'est une enquête de proximité que mène le détective. Il va tâcher de se faire une idée, une image de la victime en interrogeant tous ceux qui l'ont côtoyée. D'autant qu'ici ce n'est pas le meurtrier que cherche Scudder, puisque celui-ci, de l'avis de tous les protagonistes, est connu et s'est suicidé. C'est plutôt un portrait de la jeune femme qui a été tuée qu'il va s'évertuer à composer. Ceci nous donne droit à des pages et des pages de dialogues qui nous permettent de mieux cerner la personnalité de la victime et de son supposé meurtrier.
Ce qui fait la qualité principale des romans de Block, c'est son écriture. Son style est simple et fluide. Ses phrases son courtes. Et les nombreux dialogues donnent du rythme au récit. Le tout se lit avec une facilité déconcertante. Qui plus est, les romans, du moins les premiers, sont très courts. A peine plus de 200 pages pour Les péchés des pères. N'espérez donc pas des descriptions à n'en plus finir. Ce qui intéresse Block c'est manifestement ce que ses personnages éprouvent et comment il l'expriment.
A la différence d'un Ken Bruen, dont il faudra que je vous parle, qui est beaucoup plus désespéré, Lawrence Block nous parle d'un monde où, malgré les tragédies quotidiennes, il reste des moments de bonheur qu'il faut saisir sans trop se poser de questions.
Block est pour moi une découverte récente, comme Ken Bruen, James Crumley ou Dennis Lehane, et fut un vrai coup de coeur.
Un sympathique corbeau de mythologie exilé outre-atlantique écrivait naguère :
J'attends d'un polars 3 ingrédients de base :
- un personnage central avec des pleins et des déliés, torturé entre son travail et sa vie amoureuse, un type avec des dilemnes moraux, des squelettes dans ses placards et un sens de la répartie plus mordant qu'un pit-bull affamé.
- un décor (souvent urbain) découpé au scalpel, peuplé de figurants qui sentent bon le réel. L'âme de la ville doit avoir son écho dans la psyché du personnage central.
- une intrigue qui me fait me poser des questions, une enquête qui progresse en montrant l'absurdité de la hiérarchie, les instincts du flic, les fausses pistes que l'on aime désamorcer. La procédure policière peut être plus ou moins mise en avant, mais ça doit me happer.
(vous trouverez l'intégralité ici)
Je ne sais pas si je partage cette opinion. Ou pas. En fait, je ne m'étais jamais vraiment posé la question. Quoi qu'il en soit, les oeuvres de Lawrence Block me semblent coller pile poil à ces exigences. En particulier la série des Matt Scudder qui est, à ce jour, la seule que j'ai abordée.
Le personnage d'abord. Dans le genre plein et déliés, il n'est pas mal du tout. C'est un ancien flic devenu alcoolique. Même si ce premier opus de ses aventures n'aborde pas le sujet de manière explicite (ça viendra), le bonhomme boit beaucoup. Et pas que du café. Il a quitté la police après la mort, accidentelle, d'une fillette dont il se sent responsable. Voilà pour le cadavre dans le placard. Ses dilemmes moraux sont semés tout le long du roman. Est-il préférable de faire le mal pour de bonnes raisons ou de faire le bien pour de mauvaises ? Un flic peut-il balancer un type dans l'Hudson quand il le sait coupable de meurtre mais sans avoir de preuves ? Et ainsi de suite.
Lorsqu'il était encore dans la police, il ne refusait jamais l'argent qu'on lui proposait. Même s'il n'en aurait jamais réclamé de lui-même. Voilà pour la morale.
Pourtant, au bout du compte, même s'il ne dédaigne pas de recourir à la violence quand on le cherche, Scudder est un type bien. Il fait preuve d'une rare indulgence (plus pour les autres que pour lui-même) et se garde de juger. Ce qui le rend d'autant plus attachant.
Le décor ensuite. Il s'agit ni plus ni moins de New-York. Peut-être pas tant New-York d'ailleurs, dont on visite surtout les bars, il faut bien le dire, que les New-Yorkais. Ce qui revient au même. L'âme d'une ville ne se trouve-t-elle pas précisément dans ses habitants ? Et des New-Yorkais, forcément, on en croise. Des barmen (tiens-donc), des concierges, des portiers, des putes, des ménagères, des flics, des chauffeurs de taxi, des prêtres ... Au fil des rencontres de Matt, c'est un portrait vivant de New-York qui se forme. Sans oublier les news qui jalonnent le récit et qui complètent l'image, pas très rose, de la grosse pomme.
L'intrigue enfin. Dans ces Péchés des pères, comme souvent chez Scudder, c'est une enquête de proximité que mène le détective. Il va tâcher de se faire une idée, une image de la victime en interrogeant tous ceux qui l'ont côtoyée. D'autant qu'ici ce n'est pas le meurtrier que cherche Scudder, puisque celui-ci, de l'avis de tous les protagonistes, est connu et s'est suicidé. C'est plutôt un portrait de la jeune femme qui a été tuée qu'il va s'évertuer à composer. Ceci nous donne droit à des pages et des pages de dialogues qui nous permettent de mieux cerner la personnalité de la victime et de son supposé meurtrier.
Ce qui fait la qualité principale des romans de Block, c'est son écriture. Son style est simple et fluide. Ses phrases son courtes. Et les nombreux dialogues donnent du rythme au récit. Le tout se lit avec une facilité déconcertante. Qui plus est, les romans, du moins les premiers, sont très courts. A peine plus de 200 pages pour Les péchés des pères. N'espérez donc pas des descriptions à n'en plus finir. Ce qui intéresse Block c'est manifestement ce que ses personnages éprouvent et comment il l'expriment.
A la différence d'un Ken Bruen, dont il faudra que je vous parle, qui est beaucoup plus désespéré, Lawrence Block nous parle d'un monde où, malgré les tragédies quotidiennes, il reste des moments de bonheur qu'il faut saisir sans trop se poser de questions.
Block est pour moi une découverte récente, comme Ken Bruen, James Crumley ou Dennis Lehane, et fut un vrai coup de coeur.
N'en jetez plus, arutha, Block est inscrit sur ma liste, il aura à sa place dans ma pile à lire.
RépondreSupprimerUn gros merci pour ce coup de projecteur.
C'est que j'aime bien ce qu'il fait ce Block. Mais attention, ce n'est pas spécialement trash. Ou déjanté. Pour cela, il y a Ken Bruen et son personnage Jack Taylor. Je ne sais pas si tu connais. Encore un privé alcoolique. Mais grave celui-là. Mais pour ce qui est des intrigues. Bah y'en a pas. Enfin si, y'en a mais c'est pas là que réside l'intérêt. Taylor se plante tout le temps. C'est miracle quand il trouve la solution. Très noir mais très drôle.
RépondreSupprimerBel éclairage sur cet auteur que je ne connais pas encore, mais qui visiblement (après un bref passage sur sa fiche Wikipedia), semble avoir du potentiel. Je sens que je vais me régaler. Un petit ajout à ma PAL, un de plus me direz vous !
RépondreSupprimerEncore une fois, cet auteur est un vrai coup de coeur. Ce qui signifie que mes raisons d'aimer ce qu'il fait sont éminemment subjectives. Mais ce que j'apprécie en premier lieu c'est la facilité avec laquelle on lit ses livres. L'investissement en temps est donc faible. Je parlerai prochainement d'autres auteurs de polar qui me semblent valoir le détour.
RépondreSupprimerBon, j'ai lu ce roman en une nuit, d'une traite. Ça se boit comme du petit lait, c'est exactement ce que j'aime. Un personnage central torturé, un New York entre gris clair et gris foncé, une intrigue humaine... Je suis accro à un nouvel auteur.
RépondreSupprimerContent que ça t'ai plu, Cédric. C'est vrai que ça se boit comme du petit lait. Et si je m'en refaisais un petit ? Tu trouveras des infos utiles ici, si ce n'est déjà fait, notamment une liste chronologique des Matt Scudder.
RépondreSupprimerosti kier plate ste roman lah Tabarnak ! :o desoler mais ser vrai D:
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