vendredi 19 mai 2017

Une demi-couronne - Jo Walton

Résumé :
Londres. 1960. Dix ans ont passé depuis l'attentat contre Hitler déjoué par Peter Carmichael. L'homme qui fut un brillant inspecteur de Scotland Yard dirige maintenant le Guet, la redoutable police secrète créée par Mark Normanby pour juguler l'opposition et traquer les Juifs. Il a adopté Elvira Royston, la fille de son ancien adjoint. Alors que la jeune Elvira se forge lentement mais sûrement une conscience politique et découvre avec effroi les coulisses d'une Angleterre vendue au fascisme, de nouveaux mouvements sur l'échiquier politique secouent le pays. Le retour du duc de Windsor, fasciné par Hitler, n'étant pas le moindre. En danger, plus que jamais, Carmichael va être confronté au plus grand défi de son existence. Avec Une demi-couronne, Jo Walton clôt en beauté sa trilogie du Subtil changement (Le Cercle de Farthing, Hamlet au paradis) et nous rappelle que les Justes, aussi, peuvent écrire l'Histoire.

Non. Désolé, mais non. J'avais beaucoup aimé le premier opus de cette trilogie. Un peu moins le deuxième, auquel j'avais pourtant accordé une bonne note, sans doute eu égard au premier. Mais ce troisième ! Non, ça ne passe plus.
D'abord, il ne s'y passe pas grand chose, quand on regarde objectivement. Une jeune femme est soupçonnée d'activités terroriste. Elle est arrêtée, puis relâchée, puis arrêtée de nouveau... c'est à peu près tout. L'histoire est truffée d'invraisemblances aussi grosses que moi et je suis tout sauf maigre. L'intervention de la jeune reine Elizabeth, par exemple, est un sommet du genre. On n'y croit pas une seconde, ou du moins, je n'y crois pas une seconde. Ajoutons à tout cela que les personnages ne sont guère attachants et vous comprenez pourquoi je n'ai pas du tout adhéré à ce dernier ouvrage de la trilogie. Même Carmichael, qui est pourtant le personnage récurrent des trois volets et qui avait pas mal d'épaisseur dans le tout premier, est devenu terne. C'est tout juste si on s'intéresse finalement au sort des uns et des autres.
La fin est à la fois assez peu vraisemblable et bâclée. Comme si l'auteur n'avait plus d'idée et qu'il lui fallait conclure à tout prix. C'est, de plus, une véritable incursion dans le monde des bisounours, ce qui ne laisse jamais de m'agacer.
Ce que je vais dire est assez terrible, mais au regard des sentiments pour le moins mitigés que m'inspirent les deux derniers titres de la série, je me demande si l'ensemble n'a pas été tout bonnement surestimé. J'en viens même à me demander si l’enthousiasme général n'a pas influencé mon appréciation du premier titre. En dépit de ma vigilance, de ma prudence, ceci m'arrive parfois. Comme quoi, il ne faudrait peut-être jamais lire d'avis sur les ouvrages que l'on s’apprête à lire.   
Peut-être ne devriez-vous pas lire le mien.
Quoi qu'il en soit, je crois que l'on peut s'arrêter au premier volet qui, comme les autres, peut se lire de façon isolée.
Une grosse déception.

Moyen

jeudi 18 mai 2017

Isolation - Greg Egan

Résumé :
Nick Stavrianos est détective privé. En tant qu'ancien flic il possède des capacités physiques et mentales accrues grâce aux nods, des nanoprogrammes implantés dans son cerveau, qui modifient le champ de sa conscience. Engagé par un commanditaire inconnu, il est chargé d'enquêter sur la mystérieuse disparition d'une autiste dans un hôpital. Étrange coïncidence, cette femme est née l'année où la bulle, mystérieux champ qui sépare la Terre du reste de l'univers, est apparue. Y a-t-il un rapport entre ces deux événements ? A-t-elle été enlevée par une mégacorporation responsable de sa maladie ou par les Enfants de l'Abîme, ces jeunes sectaires qui prêchent l'apocalypse annoncée par la Bulle. Dans ce roman construit en deux parties, Egan met en scène une enquête pleine de rebondissements avant de passer à un thriller plus introspectif qui se termine de manière totalement "hallucinée". Cet étonnant représentant de la SF australienne manipule aussi bien les ficelles du roman policier que la physique quantique et les questionnements sur la réalité chers à P K Dick.

J'avais déjà fait une tentative d'incursion dans l'univers de Greg Egan sans succès. Il s'agissait d'un recueil de nouvelles dont le titre m'échappe et dont le propos m'avait alors paru si incompréhensible que j'abandonnai au premier récit. Mais comme j'aime bien donner une seconde chance aux gens, je décidai de tenter une nouvelle expérience avec ce roman.
Au début, tout était parfait. Le style était clair et je comprenais non seulement tous les mots mais aussi toutes les phrases, l'un ne conduisant pas forcément à l'autre. De plus, le récit s'avérait très prenant et j'avoue que ce mélange, réussi, de polar et de science-fiction avait tout pour me plaire. Puis, le ton change.
Et là, c'est le drame... Greg Egan, comme s'il ne pouvait s'en empêcher, introduit dans son récit l'un des concepts les plus difficiles à comprendre pour un néophyte, donc à mon avis 99 % de ses éventuels lecteurs, je veux parler de la physique quantique. Il s'agit là d'un domaine de la physique non pas tant complexe (un peu quand même) que contre-intuitif. Moi-même, bien qu'ayant parcouru quelques ouvrages abordant le sujet, j'avoue n'avoir pas compris tout ce que me disait l'auteur. Je n'ose imaginer la difficulté pour quelqu'un sans une once de connaissance dans le domaine. Pour paraphraser le génial physicien Bohr : si vous avez compris la physique quantique, c'est qu'on vous l'a mal expliquée.
Maintenant, pour être tout à fait honnête, lorsqu'on a à peu près compris où Egan veut en venir, après un bon mal de crâne, l'idée développée est assez séduisante si ce n'est très réaliste (autant que je puisse en juger compte tenu de mon faible bagage). Je veux bien tenter de vous expliquer ce que j'ai compris mais, si vous lisez la suite de ce paragraphe, c'est à vos risques et périls. En mécanique quantique, donc dans le monde de l'infiniment petit, c'est à dire l'atome, en gros, il est admis qu'il est impossible de déterminer la position d'un électron à un instant donné. Tout juste existe-t-il une probabilité qu'il soit à tel endroit plutôt qu'à tel autre. Pour ce qu'on en sait, l'électron peut même se trouver à des millions d'endroits en même temps. En revanche, dès que l'on observe la position de l'électron, toutes les possibilités de présence en tel ou tel endroit sont en quelque sorte annihilées, à l'exception d'une seule. C'est ce qu'on appelle la réduction du paquet d'onde ou l'effondrement quantique.
Ça va ? Vous êtes toujours là ? Greg Egan extrapole cette particularité et imagine un être humain capable d'extraire d'une multitudes de possibilités la seule qui l'intéresse. Autrement dit, entre des milliards de futurs possibles, il s'arrange pour ne faire exister que celui qu'il souhaite. C'est un peu comme si, achetant un billet de loterie il laisse "vivre" des millions de copies de lui-même ayant acheté un billet perdant jusqu'au moment des résultats où il ne permettrait de rester qu'à celui qui aurait acheté le billet gagnant. Anéantissant du même coup tous les autres. C'est sympa, mais appliquer au monde macroscopique les réalités du monde microscopique sont tout simplement utopistes. Mais admettons.
En revanche, j'ai plutôt bien aimé son idée des mods qui sont des modifications neurales permettant d'améliorer considérablement les facultés du cerveau. Le héros, en bon détective, en est truffé. J'aime l'humour avec lequel il cite les noms et fonctions de ses différents mods sans omettre d'en indiquer le fabricant et le prix. On ne sait jamais.
Voilà ! Un bon roman sans nul doute mais que vient gâcher cette manie (plutôt anglo-saxonne) de rendre le propos inintelligible pour qui n'a pas bac + 12 dans une filière scientifique. Désolé, mais cela ne laisse pas de m'agacer à chaque fois.
Pour ceux qui souhaitent (essayer de) comprendre la physique quantique, je ne saurais trop vous conseiller l'excellent ouvrage La physique quantique (enfin) expliquée simplement de Vincent Rollet.

Bon