Sur cette Terre de l'avenir, le jeu décide du sort des hommes. Tel qui œuvrait servilement dans une colonie industrielle peut devenir du jour au lendemain maître du monde, Meneur de Jeu, si les hasards des combinaisons atomiques du minimax en décident ainsi.
C'est ce qui arrive à Leon Cartwright, simple réparateur électronicien. Mais dans ce monde du XXIIIème siècle, l'assassinat légal du Meneur de Jeu est autorisé. Dès son arrivée au pouvoir, Cartwright se sent menacé de toutes parts malgré le corps de policiers télépathes qui est chargé de sa protection.
Encore ne sait-il pas que l'assassin qui le traque n'est pas humain et que rien ne peut l'arrêter.
Les plus jeunes sont souvent agacés et souvent à juste titre par les phrases du genre : « C'était mieux avant ». Pourtant, au risque de me faire huer, j'ai bien envie de déclarer, chaque fois que je sors de la lecture d'un roman de Dick : « C'était mieux avant ». Quand on voit la situation désespérante dans laquelle se situe la Science-Fiction de nos jours, on ne peut que regretter son âge d'or. Bien sûr, il reste encore quelques auteurs très intéressants dans ce domaine, mais tellement moins qu'il y a trente ans. Mais heureusement, rien ne nous empêche de replonger ou plonger tout court dans les romans de l'époque et en particulier dans ceux du maître. Mais fermons ici la parenthèse nostalgie.
Loterie Solaire est le premier roman de Dick. Il l'a écrit en 1955. Soit il y a plus de 55 ans. Il n'a toutefois pas pris une ride. Il est assez peu souvent cité pourtant il fait partie des romans de l'auteur que je préfère. L'intrigue est assez simple et se déroule sur seulement quelques jours. Leon Cartwright est devenu Meneur de Jeu et il va devoir déjouer les plans machiavéliques de son prédécesseur, Reese Verrick, qui souhaite assassiner (légalement) le nouveau maître du monde et retrouver sa place.
Comme à son habitude, Dick parvient à nous brosser en simplement quelques phrases l'univers dans lequel évolue l'action. Dans ce monde assez effrayant, l'homme le plus puissant de la terre est désigné par le hasard. N'importe qui peut assassiner le Meneur de Jeu, de la façon la plus légale qui soit, même si l'exercice est très règlementé. Les citoyens sont rangés en deux catégories : les classés et les non-classés. Pour travailler pour quelqu'un, il faut lui prêter un serment d'allégeance qui fait de l'employé un véritable serf. Le Meneur de Jeu est protégé par un corps de policiers télépathes qui doivent allégeance à la fonction et non à l'homme.
Avec ces quelques éléments, Dick nous gratifie de ce que je qualifierais de thriller de Science-Fiction. Un roman d'action mené tambour battant. La réflexion n'y est portant pas totalement absente puisque l'auteur nous invite à réfléchir sur certaines question importantes. Notamment celle-ci : peut-on désobéir à des lois qui heurtent notre conscience ?
- (...) Est-ce un crime que de désobéir à une loi infâme ou à un serment vicié ?
- C'est un crime, dit Cartwright lentement. Mais il est peut-être bon de le commettre.
- Dans une société de criminels, avança Shaeffer, les innocents vont en prison.
Et pour ne rien modifier à ce qui est quasiment une marque de fabrique, Dick dresse une nouvelle fois (ou plutôt une première fois, s'agissant d'un premier roman) les portraits d'individus tout ce qu'il y a d'ordinaires.
Un premier roman extraordinaire plutôt moins tourmenté que tous ceux qui allaient suivre. Et une fois de plus, je ne me lasse pas de le répéter, Dick nous offre une histoire solide et palpitante en seulement 182 pages.