mardi 1 novembre 2016

Six jours - Ryan Gattis

Résumé :
Pendant six jours, Los Angeles est une ville assiégée.
Pendant six jours, dix-sept personnes sont prises dans le chaos. Pendant six jours, Los Angeles a montré au monde ce qui se passe quand les lois n’ont plus cours.
Le premier jour des émeutes, en plein territoire revendiqué par un gang, le massacre d’un innocent, Ernesto Vera, qui rentrait chez lui après sa journée de travail, déclenche une succession d’événements qui vont traverser la ville.
Dans les rues de Lynwood, les tensions s’exacerbent, les membres de gangs chicanos profitent des émeutes pour piller, vandaliser, et régler leurs comptes. Au cœur de ce théâtre de guerre urbaine se croisent sapeurs pompiers, infirmières, ambulanciers et graffeurs, autant de personnages dont la vie est bouleversée par ces journées de confusion et de chaos. 

Avant toute chose, je crois que je me dois de faire une introduction en forme d'avertissement : ce roman est violent, extrêmement violent. Âmes sensibles s'abstenir. Maintenant, une fois que j'ai dit ça, je n'ai rien dit . Rien dit des qualités exceptionnelles du livre, de la qualité d'écriture, de la force évocatrice du récit, ou plutôt des récits, qui vous prend, vous emporte et ne vous lâche plus jusqu'à la fin où vous vous retrouvez petite chose secouée semblable à un débris qu'une mer démontée aurait rejeté sur la plage.
 Je parle de qualité et la première d'entre elles est, à l'évidence, car on s'en rend compte dès les premières pages, que les évènements de ces six jours sanglants sont vus par des personnages différents. Alors, vous me direz, c'est du déjà vu et revu. Certes, mais lorsque ces personnages sont aussi nombreux et s'expriment tous, je dis bien tous, à la première personne, là je dis que ça devient franchement intéressant. Intéressant n'étant qu'un pauvre mot qui ne rend pas hommage au procédé et que vous pouvez remplacer par : génial, fabuleux, extraordinaire, exceptionnel, enfin, vous avez le choix.
C'est ainsi qu'on change chaque fois de point de vue, qu'on passe littéralement de l'intérieur d'une tête à l'intérieur d'une autre tête. Le style change, la façon de s'exprimer change, l'intelligence de chacun, sa sensibilité, sa force, sa faiblesse, tout ça vous tombe dessus sans transition aucune. Sans aller jusqu'à dire que chacun d'eux devient attachant, s'agissant tout de même pour la plupart de membres endurcis de gangs violents, on se prend tout de même à comprendre leur motivations à défaut d'excuser leurs actes.
Rassurez-vous, les évènements ne sont pas répétés ad nauseam par plusieurs personnages y ayant participé, directement ou indirectement. Cela arrive bien de temps en temps, comme des clins d’œil mais l'auteur prend bien garde de ne pas s'apesantir sur une scène qu'il a déjà traitée par ailleurs.
Non, je crois qu'il faut plutôt voir dans cette succession de «témoignages» comme des dominos placés debout l'un derrière l'autre et dont on fait basculer le premier d'une pichenette provoquant ainsi la chute de tous les autres, un par un. Chaque personnage possède un lien, de fort, permanent à léger, temporaire avec le personnage suivant. Pour utiliser une image cinématographique, c'est comme si la caméra, après s'être intéressé à un personnage, bascule soudain sur un autre et abandonne le premier pour le second, et ainsi de suite.
Une autre des qualités du roman réside dans le souci de Gattis de nous faire entrer dans la tête d'au moins un représentant de tous les corps de métier impliqués dans l'histoire. Les acteurs, les victimes, les témoins. On passe ainsi, en dehors des membres des gangs à des policiers, des infirmières, des pompiers, des commerçants, des tagueurs...
C'est en outre bien écrit. C'est fort, c'est puissant, c'est bouleversant. Ce roman est un portrait sans concession et, me semble-t-il, réaliste d'une ville, Los Angeles, qui, si elle ne peut être réduite à cette violence permanente, érigée en mode de communication, ne peut sans doute pas nier le fait qu'elle soit l'une de ses facettes et non la moindre.
Dernière précision, si les émeutes de 1992 servent de toile de fond au roman il y est surtout question de ce règlement de compte qui dégénère en bain de sang, même si ce sont précisément les dites émeutes qui ont permis les exactions dont nous sommes les témoins.
Alors si vous aimez être virtuellement traîné dans la poussière attaché à la queue d'un cheval fou, précipitez-vous sans plus attendre sur ce livre qui devrait vous couper le souffle. Un vrai coup de cœur même si le terme semble inapproprié. Un ouragan ? Une tornade ? Peu importe, l'idée est là.

J'ai lu ce livre dans le cadre d'une lecture commune avec mon amie'naute Fan2polar dont vous trouverez la chronique ici.

Excellent. Coup de cœur.

2 commentaires:

  1. Moi j'aurais dit "coup de poing" plutôt que "coup de cœur" ! ;-) En tout cas, un livre qui laissera des traces ...
    Comme toujours ta chronique est percutante et donne un aperçu exact de ce qui fait la force de ce magnifique roman.

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    1. T'aurais dit, t'aurais dit. Fallait me le dire avant que je publie. Gnark, gnark.

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